Les maladies éruptives surviennent principalement chez l’enfant, car elles représentent, pour la plupart, la primo-infection due à divers agents infectieux. Elles confèrent, ensuite, une immunité acquise qui peut être définitive si elle est entretenue par des contacts infracliniques réguliers avec l’agent causal.
Maladies généralement sans gravité, elles sont très souvent contagieuses voire épidémiques, et peuvent représenter une menace pour des sujets réceptifs plus vulnérables (immuno-supprimés, femmes enceintes). De plus, il faut aussi pouvoir identifier les maladies éruptives plus rares qui sont le reflet d’une affection sévère.
L’exanthème, défini comme l’apparition de lésions cutanées ou rash, s’accompagne parfois d’un énanthème ou atteinte des muqueuses. L’étiologie d’un exanthème, accompagné ou non de fièvre, est majoritairement virale. L’éruption virale est polymorphe mais les deux principaux aspects observés sont l’éruption maculo-papuleuse et l’éruption vésiculeuse. La première correspond à des macules érythémateuses plus ou moins surélevées, éléments séparés plus ou moins larges et parfois confluents. De très nombreux agents infectieux peuvent être impliqués. Les vésicules sont, quant à elles, aisément reconnaissables et orientent vers l’herpès simplex ou zoster et, les entérovirus. Un rash scarlatiniforme, même si une origine virale ne peut être exclue, oriente rapidement vers une infection bactérienne et le plus souvent vers le streptocoque du groupe A. Il se distingue par de larges plaques rouge foncé, voire purpuriques, avec un aspect chaud et grenu à la palpation.
Les affections bactériennes
Le purpura méningococcémique est une affection rare mais redoutable et potentiellement létale. Le degré de suspicion doit être élevé et motiver une prise en charge rapide. Survenant en toutes saisons et à tous les âges, il se caractérise par l’apparition brutale de lésions papuleuses purpuriques qui s’élargissent et s’étendent, promptement, à l’ensemble du corps. L’enfant est septique. L’administration d’antibiotiques intraveineux doit être précoce pour améliorer le devenir du patient. La vaccination universelle contre le méningocoque du groupe C en a modifié l’incidence.
Affection bactérienne qui reste fréquente, la scarlatine est liée à l’infection par le streptocoque du groupe A. Elle survient essentiellement chez les enfants en âge scolaire et se manifeste par une pharyngite fébrile brutale accompagnée d’un rash scarlatiniforme, plus marqué au niveau des plis (signe de Pastia), d’une altération plus ou moins sévère de l’état général et de symptômes digestifs. L’évolution est rapidement favorable sous pénicilline ou aminopénicilline orale. La contagiosité est maximale au début de l’affection mais est abolie après 24 heures d’antibiothérapie. Le choc toxique est une affection rare. Un des signes est une érythrodermie plutôt qu’un rash.
Les affections virales
Les infections virales à l’origine d’une éruption cutanée sont très nombreuses. Certains virus sont responsables de tableaux cliniques caractéristiques et facilement identifiables. Le tableau 1 reprend les spécificités de quatre maladies éruptives classiques du jeune enfant.
La vaccination universelle a nettement diminué l’incidence de la Rubéole et de la Rougeole, deux maladies éruptives bien connues. Cependant, des cas peuvent toujours survenir, dépendant de la couverture vaccinale et des flux migratoires. Les caractéristiques sémiologiques des deux entités sont reprises au tableau 1. Les enfants atteints de rougeole ont souvent un état général altéré, ils sont irritables et accablés. Les complications peuvent être sévères comme la méningo-encéphalite ou la pan-encéphalite sclérosante subaiguë.
La rubéole a un décours et une présentation généralement plus bénins. La gravité de cette affection est l’atteinte materno-foetale et le syndrome de rubéole congénitale. Cette entité motive la vaccination universelle contre la rubéole.
La roséole, appelée également exanthème subit ou sixième maladie, est une infection virale courante chez les jeunes nourrissons.
L’évolution très particulière de la fièvre et de l’éruption permet assez facilement le diagnostic. L’incubation, silencieuse, dure 3 à 5 jours. Elle est suivie d’une phase de virémie uniquement marquée par de la fièvre importante (39/40°C) qui dure généralement 3 jours. Cette fièvre isolée se complique fréquemment de convulsions fébriles. L’examen clinique montre inconstamment une pharyngite vésiculeuse et des adénopathies cervicales, à ce stade. La phase éruptive apparaît au 3e jour : la fièvre chute brutalement, et simultanément, apparaissent sur le tronc et les membres des macules ou maculo-papules rosées très pales respectant la face. L’enfant recouvre un état général normal. L’éruption ne dure jamais plus de 48 heures, peut passer inaperçue tant elle est pale et discrète, et, disparaît sans desquamation ni hyperpigmentation.
Le mégalérythème épidémique ou cinquième maladie est lié au parvovirus B19. Maladie saisonnière survenant à la fin de l’hiver et au printemps, elle se marque uniquement par sa phase d’état, l’éruption. Celle-ci évolue en trois stades ; d’abord un érythème maculo-papuleux des joues "en paire de claques", ensuite, 3 à 4 jours plus tard, apparaissent des macules rosées et réticulées sur les membres en "dentelle", légèrement prurigineuses, et, finalement, l’éruption s’efface en une dizaine de jours, avec rappel occasionnel à la chaleur ou au soleil. La fièvre est discrète (38°C) ou absente. Il s’agit d’une affection bénigne dont le diagnostic repose sur la clinique. Chez les individus atteints d’une maladie hémolytique chronique, le parvovirus B19 peut engendrer une crise érythroblastopénique aiguë en dehors de toute éruption. Il faut aussi éviter la contamination pendant la grossesse qui peut s’accompagner d’un faible risque d’anasarque fœtal. Cependant, la contagiosité est significative 1 à 5 jours avant la survenue de l’éruption, rendant la prévention de l’infection plus complexe.
La maladie Pied-main-bouche est une infection survenant en saison estivale chez les enfants d’âge préscolaire. Les entérovirus et plus particulièrement le coxsackie A16 ou l’entérovirus 71 en sont les principaux agents responsables. Elle se caractérise par la survenue de vésicules à contenu clair ou citrin cernées d'un liseré rouge, ou de maculo-papules rouges situées au niveau des mains et des pieds et de vésicules et lésions érosives douloureuses de la bouche et des lèvres. La difficulté principale liée à cette affection est le refus alimentaire suite à la douleur engendrée par les lésions buccales. Une couverture par antidouleur systématique peut éviter la dysphagie et l’anorexie. Le décours est généralement favorable sans traitement spécifique. D’une année à l’autre, l’incidence de ces deux dernières entités varient selon l’épidémiologie locale.
Les infections à entérovirus sont à différencier de la varicelle, autre éruption vésiculeuse. Le rash généralisé prédomine alors au niveau du tronc. Il est composé de lésions maculo-papuleuses qui deviennent vésiculeuses et croûteuses et, dont les éléments d'âge et d'aspect différents cohabitent dans un même territoire cutané. Les lésions laissent place à des cicatrices hypo ou hyper-pigmentées. Un énanthème de type vésicules ou lésions érosives sur les muqueuses buccale et génitale accompagne généralement l’atteinte cutanée. L’affection guérit habituellement en 7 à 10 jours. Les complications de types surinfections bactériennes ne sont pas si rares et peuvent être sévères. L’administration d’AINS favorise la survenue de fasciïte nécrosante et doit être proscrite en cas de varicelle.
Par ailleurs, de nouvelles maladies ont été décrites : la maladie de Kawasaki, de rencontre occasionnelle et d'origine mystérieuse, et la maladie de Gianotti- Crosti, expression assez fréquente de diverses infections virales (EBV). La première est une vascularite systémique, d’apparition brutale et dont le risque majeur est le développement d’anévrysme coronarien. Le diagnostic repose sur un faisceau de critères cliniques. La présence de cinq d’entre eux est indispensable pour confirmer le syndrome. L’étiologie en est toujours indéterminée actuellement.
La maladie de Gianotti-Crosti se caractérise par la survenue d’une éruption faite de papules rosées ou rouges, parfois purpuriques, de petites tailles, situées classiquement sur les joues, les coudes et les genoux. Parfois, on observe de larges placards rouges et surélevés par coalescence de ces lésions. Elles guérissent sans cicatrice en 2 à 4 semaines. Il n’y a pas d’atteinte des muqueuses. L’enfant conserve un bon état général, la fièvre est modérée voir absente. Le décours est habituellement favorable.
CONCLUSION
Les maladies éruptives sont fréquentes chez l’enfant. Les caractéristiques de l’éruption, les signes et symptômes associés, l’âge de l’enfant, les circonstances de survenue, le contexte épidémiologique et le carnet de vaccination permettent généralement d’orienter le diagnostic ainsi que la prise en charge. Le cortège biologique permet d’approcher le diagnostic dans les cas atypiques, mais, doit toujours être interprété en conjonction avec la clinique et l’épidémiologie.