Dr Vincent Bex, Dr Laurent Collignon, Dr Caroline Dresse, Didier Koch, Dr Bruno Leroy
On distingue habituellement trois phases dans la douleur (lombaire ou radiculaire) :
- phase aiguë (jusqu’à 6 semaines, avec une phase hyperaiguë de 0 à 7 jours) ;
- phase subaiguë (entre 6 et 12 semaines) ;
- phase chronique (plus de 12 semaines). Cette phase ne concerne qu’une minorité de patients car les symptômes diminuent généralement au fil du temps.
La structure de l’itinéraire de soins est calquée sur ces trois phases.
La recherche de drapeaux rouges (signe d’alerte) sera systématiquement prévue à chaque rencontre avec le patient, que celui-ci présente une douleur lombaire ou radiculaire. En cas de douleur radiculaire, la mesure de la force musculaire sera également recommandée à chaque consultation.
L’itinéraire de prise en charge de la lombalgie sera clairement distingué de celui de la douleur radiculaire et les interventions spécifiques à ces deux problèmes seront présentées séparément.
Pour appuyer un changement d’habitude en matière d’imagerie, l’itinéraire rappellera à chaque étape que les examens d’imagerie ne doivent être envisagés qu’en cas de suspicion de cause sous-jacente grave, ou si ses résultats sont susceptibles de modifier la prise en charge (par exemple si une infiltration épidurale ou une chirurgie du rachis est envisagée).
L’itinéraire proposera un suivi régulier pour chaque patient dès la première rencontre, avec une deuxième consultation après environ 2 semaines pour le patient lombalgique (sauf si disparition de la douleur) et après 1 semaine chez le patient souffrant de douleur radiculaire.
Le médecin généraliste possède un rôle essentiel dans la coordination des soins. Il est en charge du triage diagnostic, de la centralisation des données dans le dossier médical, de la prescription éventuelle d’imagerie ou de médicaments, etc. Nous attendons également de lui qu’il rassure et encourage leurs patients à poursuivre leurs activités physiques et quotidiennes, qu’il présente et explique les différentes options thérapeutiques, qu’il évalue l’amélioration ou non des plaintes du patient, etc.
Parcours des patients présentant une lombalgie
Pour le parcours des patients présentant une lombalgie, il s’agit souvent d’un problème de dysfonction d’une articulation ou de son environnement (tendons, ligaments, muscles) qui entraîne une contracture douloureuse des muscles. Le traitement de départ comprend antalgique, AINS et autogestion. Après 3 semaines, des séances de kinésithérapie peuvent être indiquées. Le rôle du kinésithérapeute sera d’écouter les plaintes du patient, d’encourager une activité, de répondre aux inquiétudes quant aux résultats d’imagerie et à la douleur, d’encourager l’autogestion et d’assurer l’éducation neuroscientifique du patient. Une bonne hygiène de vie avec de l’exercice physique éloigne la récidive et le risque de douleurs chroniques.
Si la lombalgie devient chronique, il vaut mieux référer à un spécialiste en médecine physique et réadaptation. Dès la phase subaiguë, le risque de passage à la chronicité augmente. L’itinéraire comprendra systématiquement une évaluation des risques de passage à la chronicité (basée sur les drapeaux jaunes, bleus et noirs) et ce, dès la phase aiguë.
C’est pourquoi on estime aujourd’hui que les patients qui ne présentent pas d’amélioration en dépit d’une prise en charge adéquate en 1ère ligne devraient être orientés sans tarder vers un médecin de 2ème ligne. Le spécialiste en médecine physique et réadaptation (MPR) est le professionnel le plus indiqué pour amorcer cette prise en charge au stade subaigu et assurer une coordination des soins de 2ème ligne avec prise en charge interdisciplinaire.
Parcours des patients présentant une radiculalgie
Pour le parcours des patients présentant une radiculalgie, le traitement débute de la même façon, avec AINS, antalgique, kinésithérapie et maintien d’une activité physique. L’envoi vers un spécialiste est plus rapide. Le spécialiste adéquat dans ce cas-ci est l’anesthésiste-algologue ou le chirurgien de la colonne (chirurgiens orthopédistes et neurochirurgiens). Les missions de ceux-ci sont multiples dans la prise en charge de la lombalgie et des douleurs radiculaires :
- évaluation des facteurs de risque ;
- interventions techniques (par exemple, infiltrations péri-radiculaires en cas de douleur radiculaire persistant plus de 2 semaines avec une intensité > 5 sur l’échelle NRS de 1 à 10) ;
- interventions chirurgicales (par exemple, décompression lombaire en cas de douleurs lombaires subaiguës) ;
- prise en charge symptomatique des patients chroniques dont le pronostic est défavorable.
Leur rôle est prépondérant dans la prise en charge des douleurs radiculaires. Pour ce type de douleurs, les spécialistes des quatre disciplines (MPR, anesthésie-algologie, neurochirurgie et chirurgie orthopédique) doivent être impliqués de manière interdisciplinaire, en particulier au-delà de 6 semaines d’évolution défavorable.
Si la douleur devient chronique, le modèle biopsychosocial est celui qui apporte les meilleurs résultats. Une prise en charge interdisciplinaire apparaît nécessaire en raison des facteurs cognitifs et affectivo-motivationnels qui deviennent prédominants sur les facteurs sensori-discriminatifs. Dans les programmes de gestion de la douleur, comme « l’école du dos », différentes disciplines interagissent de façon à aider le patient à atteindre un objectif fonctionnel qu’il s’est fixé. Le patient sera encouragé à faire des activités en dehors du centre afin de rendre pérenne son changement de comportement.
Checklist avant une infiltration rachidienne
- La douleur est-elle présente depuis 2 semaines à 3 mois ?
- La douleur a-t-elle une topographie radiculaire ou pseudo-radiculaire (syndrome facettaire) ?
- La douleur est-elle en lien avec un conflit radiculaire ou un syndrome facettaire ?
- L’infiltration de cortisone est-elle “safe” pour ce patient (diabète, arrêt des anticoagulants, sepsis, drapeau rouge) ?
- Si une réponse est non, il est préférable de prendre un avis auprès du médecin qui infiltre par téléphone ou par mail (coordonnées sur le site de la Citadelle) ou de l’adresser en consultation au centre de la douleur (Secrétariat du centre de la douleur : 04 321 82 68)