En région liégeoise, depuis plus de vingt-cinq ans, le service de cardiologie du CHR de la Citadelle participe de façon très active à la recherche clinique qui aboutit à la mise au point de nouveaux traitements (médicamenteux et non médicamenteux).
Concernant la télémédecine, au milieu des années 2000, des projets de télé-suivi (télé-monitoring) ont été mis en place pour le suivi des patients porteurs de stimulateurs cardiaques (PCMK). En effet, c’est dans le domaine de la stimulation cardiaque
2 que le télésuivi a démontré son efficacité en permettant d’éviter des contrôles systématiques et de dépister de façon précoce des arythmies (FA) et des problèmes techniques éventuels. Chaque année, plus de 150 patients bénéficient d’un suivi à distance des données de leurs dispositifs (AICD, CRT-P, CRT-D et holters implantables). Cette prise en charge est possible grâce à une équipe médicale et paramédicale formée et expérimentée permettant de détecter précocement d’éventuels troubles rythmiques ou dysfonctionnements des dispositifs (batterie, sondes …) et ainsi de prévenir les déstabilisations, les hospitalisations par l’analyse des paramètres des patients (variabilité sinusale, activité du patient, détection précoce arythmie (FA, TV) et contrôle de l’efficacité et efficience de la CRT).
Parallèlement, des études pilotes de télémonitoring de patients insuffisants cardiaques non appareillés ont été réalisées en collaboration étroite avec la médecine générale. Les patients inclus dans ces études étaient invités à prendre chaque jour leurs paramètres à domicile, avec des appareils de mesure connectés : pression artérielle, rythme cardiaque, saturation en oxygène, nombre de pas et poids
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Enfin, une nouvelle étape a été franchie en septembre 2018 avec l’implantation d’un capteur (CardioMems®) dans une branche de l’artère pulmonaire pour le suivi d’insuffisants cardiaques sévères. Grâce à ce système de TM, nous pouvons anticiper à deux ou trois semaines les épisodes de déstabilisation et adapter rapidement le traitement. Des études internationales ont démontré que ce type de suivi à distance permettait de réduire de 30 à 40 % les hospitalisations et la mortalité
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Une autre facette de la télécardiologie est le développement d’applications « santé » via les smartphones. Par exemple, l’application belge Fibricheck
® permet de surveiller le rythme cardiaque et d’envoyer les résultats directement à son médecin. Le principe est simple : après avoir obtenu une ordonnance virtuelle via un QR code, fournie par son médecin, les mesures sont effectuées en une minute environ, en posant simplement le doigt sur la caméra sans appuyer. Elles peuvent être envoyées au médecin en temps réel, qui pourra les analyser et réagir au besoin. Ce système de surveillance de rythme cardiaque peut prévenir et détecter les arythmies.
Le télésuivi de l’hypertension artérielle est également un challenge important : l’automesure de la tension artérielle est aujourd’hui un critère de référence et le télésuivi des chiffres tensionnels devrait permettre une meilleure adhérence aux traitements avec de moindres complications.
Cependant, en Belgique, nous sommes face à une série d’inconnues et de limitations dans l’utilisation de la télémédecine et de la télécardiologie.
Le développement de la TC est un axe de prise en charge du futur mais impose une organisation des soins pour un suivi optimal des patients. Il est nécessaire de définir de façon claire les rôles et les responsabilités de chaque acteur pour gérer les données d’un grand nombre de patients.
En effet, actuellement, les prestataires de soins sont exposés à un risque médico-légal non négligeable !
C’est pourquoi, la plupart des activités décrites ne sont possibles que dans le cadre de protocoles de recherche avec une information adéquate du patient sur les limites de l’utilisation de la TM.
De même, il n’existe aucun financement pour le matériel, l’hébergement, la sécurité des données, leurs analyses et le suivi par les prestataires de soins. Des craintes existent également concernant la sécurité de ces données sensibles qui pourraient être détournées.
Enfin, nous devons rester vigilants quant aux dérives mercantiles ou commerciales qui n’apportent pas de garantie en termes de qualité de suivi et d’expertise.
Finalement, l’explosion du volume de données à analyser quotidiennement impose le développement d’algorithmes décisionnels pour caractériser les alertes nécessitant un avis médical urgent, et celles qui peuvent être classées après une première lecture sans intervention médicale. Les données pertinentes doivent être partagées et intégrées dans le dossier médical du patient de même que les interventions qui en découlent.
En conclusion, en Belgique, la TM et la TC pourront représenter une opportunité pour relever les défis futurs, si et seulement s’il y a :